Quelle est la particularité de votre entreprise ?
Eva : Nous sommes une SARL presque comme les autres, spécialisée dans la sous-traitance industrielle. Nous proposons des prestations manuelles dans l’industrie : assemblage ; conditionnement, électronique, …
Nous signons un contrat triennal avec l’Etat qui donne l’agrément « entreprise adaptée ». L’agrément est donné lorsque 80 % des salariés en production sont reconnus travailleurs handicapés ; ici nous avons 100 % de notre personnel en situation de handicap.
Qui sont vos salariés ?
Eva : Nos opérateurs sont reconnus travailleurs handicapés par la MDPH (anciennement COTOREP) ; ils peuvent travailler chez nous, mais également dans une entreprise ordinaire.
Ils ont des handicaps divers, cela peut aller de la déficience mentale légère, aux accidents de la vie. Donc, des profils très différents en termes d’autonomie, de parcours professionnels, de qualification. Certains n’ont pas besoin d’aménagements particuliers, alors que d’autres ont des besoins plus importants en matière d’encadrement et de contrôle.
Pourquoi les entreprises font-elles appel à vous ? Par philanthropie ?
Eva : Les clients viennent vers nous principalement, car ils recherchent des sous-traitants dans l’industrie et que nous avons un taux horaire intéressant. Les entreprises peuvent nous quitter du jour au lendemain si le travail est mal fait.
Ce n’est pas forcément lié au handicap de nos salariés même si certains clients sont venus chez nous, car ils savent que nous sommes une entreprise adaptée et qu’à la fin de l’année ils peuvent récupérer des unités bénéficiaires. De plus, cela leur permet pour moitié de satisfaire à l’obligation pour l’emploi.
Moussa : D’après ce que je constate, les motivations de nos clients sont purement économiques. Et ils restent chez nous, car le travail est bien fait.
Pouvez-vous me décrire une journée de travail ?
Moussa : Nous recevons le matin du matériel et en fonction j’organise notre travail. Je leur fais d’abord un modèle et ensuite ils exécutent en fonction de ce qui est demandé en terme de qualité et de productivité. Il faut que les opérateurs soient dans le timing donné.
Il n’y a pas vraiment de journée type. Nous dépendons vraiment de nos clients et de la marchandise qu’ils nous envoient.
Quelles sont les compétences professionnelles de vos opérateurs polyvalents ?
Moussa : Dès l’instant où les opérateurs entrent chez nous, nous les mettons sur les postes et nous les formons à chaque produit.
La qualification à la base n’est pas un critère de sélection sauf sur l’électronique. Nous faisons partie des rares entreprises adaptées qui proposent des prestations électroniques, mais pas avec des exigences moindres. La qualité demandée est la même que pour une entreprise dite ordinaire. On travaille notamment pour l’Armée et ils sont très exigeants.
Les malfaçons peuvent avoir des conséquences importantes pour nos clients. Par exemple, nous assemblons des têtes d’extincteurs, donc nous n’avons pas le droit à l’erreur. L’auto-contrôle est une compétence importante que nos opérateurs acquièrent avec le temps.
Mon travail est de les encadrer, de les rassurer si un problème survient et de trouver des techniques adaptées dans l’exécution de leurs tâches. Parfois, malgré la recherche d’aménagements, l’opérateur a ses limites et n’y arrive pas toujours. Il faut prendre cette variable en compte et jongler entre les différents opérateurs pour que la commande puisse être terminée.
Quelles sont les qualités de vos employés ?
Moussa : On entend souvent dire que les salariés handicapés sont lents. C’est un préjugé, car c’est totalement faux.
Par exemple, lorsque nos opérateurs vont chez le client en prestation sur site, il s’est avéré que le client a demandé à nos salariés de freiner la cadence, car ils allaient plus vite que leurs propres opérateurs.
On associe beaucoup handicap avec absentéisme, manque de compétences, erreurs, … alors que c’est faux. Nous n’avons pas plus d’absentéisme que dans une entreprise ordinaire.
Une personne handicapée pourra être aussi productive et aussi habile qu’une personne ordinaire.
Eva : Nos clients sont exigeants et nous devons répondre aux mêmes conditions de qualité et de fiabilité que les autres sous-traitants. Si nous n’étions pas professionnels, nous aurions fermés depuis longtemps.
Comment recrutez-vous vos salariés ?
Eva : Nous sommes contactés directement par des travailleurs handicapés ou par notre réseau d’association qui s’occupe de publics fragilisés.
Une fois le candidat sélectionné, il effectue un stage avant l’embauche. Cela lui permet de découvrir le milieu de travail, le milieu de la sous-traitance industrielle. De notre côté, cela nous permet de le tester et d’évaluer sa capacité d’évolution.
Quels sont les avantages à embaucher des personnes handicapées
Moussa : Nous n’avons aucun turn-over. Dernièrement nous avons une salariée qui est partie en congé parentale et un autre qui a changé de métier, mais sinon, nos salariés sont fidèles et sont très peu absents.
Eva : Nos salariés sont très investis et fidèles.
En conclusion
Moussa : Il faut donner leur chance aux travailleurs handicapés. Nos opérateurs nous enrichissent tous les jours, nous nous prenons une claque, mais dans le bon sens. Ils nous donnent beaucoup. Ici, je me sens utile dans mon travail.
Une personne handicapée ne demande qu’à être reconnue comme une personne ordinaire, comme tout le monde.
Eva : Pour moi, notre travail a du sens par rapport à une entreprise lambda. Je ne me vois pas travailler ailleurs. Ici, tout le monde se plie en quatre pour que l’entreprise tourne.
Quand mon père a monté cette entreprise, son objectif était de créer de l’emploi pour les personnes handicapées. Et je continue dans cette voie.
TH – Oise SARL
Entreprise adaptée & social et solidaire
www.th-oise.com