Il faut oser, malgré la part d’incertitude
Troquer les boîtes de médicaments alignées sur les rayons pour un métier au grand air, à deux pas d’un moulin à vent du XVIe siècle. C’est la reconversion professionnelle opérée par Matthieu Huet. Ce Breton dirige aujourd’hui la Cidrerie de l’Apothicaire, à Clohars-Carnoët (Finistère), et écoule sa production en vente directe et circuit court auprès des restaurants et commerces du secteur.
“Je me sens plus libre, mon activité est plus diversifiée, même si la charge de travail est importante. J’aime le côté manuel, faire mes produits à ma façon. C’est conforme à ma vision du métier de producteur de cidre.” Avec, présente dans un coin de la tête, la peur de rater son breuvage. Produit vivant oblige.
Il faut dire que le ver était dans le fruit depuis un certain temps. Matthieu se sentait à l’étroit dans sa blouse de pharmacien. “J’ai exercé en officine, de 2012 à 2017, autour de Quimperlé. Je n’y trouvais pas mon compte. Il y a un côté commerce trop présent, un rôle d’exécutant plus qu’un rôle d’intervention vis-à-vis des traitements. Intellectuellement, c’était trop pauvre : en officine, on utilise assez peu les connaissances acquises pendant nos études.” Il imagine son avenir professionnel dans le cidre, qu’il produit déjà en amateur avec un ami.
Formation unique en France
À 32 ans, Matthieu Huet prend la direction du CFPPA (centre de formation professionnelle pour adultes) Le Robillard, à Saint-Pierre-en-Auge (Calvados) pour y préparer un brevet professionnel de responsable d’exploitation agricole (BP REA) avec module production et transformation de pommes à cidre. Une formation unique en France, d’un an, comprenant 1 200 heures de cours en présentiel et 280 heures de stage en entreprise. “C’est plus facile de suivre une formation de ce genre pour s’installer comme agriculteur.” Inscrit comme demandeur d’emploi, sa formation est financée par Pôle emploi et la Région Normandie.
Il apprend à conduire un verger de pommes à cidre, affine ses connaissances sur le cidre, sur les aspects techniques et pratiques du fonctionnement d’une cidrerie. “Mes connaissances en chimie ont bien aidé”, s’amuse-t-il.
Mûrir son projet
Diplôme en poche, Matthieu trouve rapidement des locaux à louer. Court à gauche et à droite pour dénicher du matériel de production d’occasion. “Et pour trouver des pommes… Il y a par ici des vergers dont personne ne s’occupe.”
Avec le recul, il se dit content du chemin parcouru, mais conseille de “bien penser son projet avant de se lancer, et se donner les moyens de réussir. Il faut oser, malgré la part d’incertitude. Personnellement, je me sentais prêt, car c’est un domaine qui me passionne.”
Article publié dans Inffo Formation 999